TEST de Xenogears sur Playstation

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Quand on évoque les RPG qui ont marqué notre chère Playstation, quelques noms, devenus de véritables porte-étendards de la machine au fil du temps, se bousculent sur toutes les lèvres : « Final Fantasy VII », « Alundra », « Suikoden »… Parfois, au détour de la conversation, surgit le nom de « Xenogears », certes connu de nom, mais que peu de joueurs ont pu découvrir. Sorti en octobre 1998 aux Etats-Unis, Xenogears, probablement le titre le plus célèbre de Tetsuya Takahashi, reste plus connu pour la violente polémique qu’il a déclenchée à sa sortie que pour ses réelles qualités. Le jeu a pourtant rencontré un véritable succès d’estime et certains n’hésitent pas à le proclamer meilleur jeu de rôle de la console ! Quelle est la raison de cet engouement ? Xenogears est-il un jeu à redécouvrir ? Réponse dans ce test.

Le fantôme dans la machine

Xenogears est un de ces RPG entièrement en 3D, qu’il s’agisse des décors ou des personnages, très en vogue à l’époque de sa sortie. Aujourd’hui, malheureusement, l’ensemble a mal vieilli : les personnages sont très pixellisés, de même que les décors, cubiques et peu aguicheurs. Final Fantasy VII, sorti un an plus tôt, est plus agréable à regarder de nos jours ! La plastique de Xenogears est donc un des points faibles du titre pour quelqu’un qui le découvrirait aujourd’hui.

Toutefois, tout n’est pas à jeter ; comme dans beaucoup de RPG estampillés Squaresoft, les cinématiques sont de toute beauté et font honneur à la puissance de la console de Sony. Au-delà des cinématiques en images de synthèse coutumières des productions de la firme au triangle rouge, Xenogears impressionne surtout grâce à des cinématiques dans le style d’un anime japonais, réalisées par les dessinateurs de l’incontournable Ghost in the Shell ! Ces séquences sont l’occasion de se régaler visuellement ; dommage toutefois qu’elles soient peu nombreuses, et surtout concentrées au tout début et à la toute fin de cette (longue) aventure…

Les combats entre Gears constituent une part non négligeable du titre.

Demandons atterrissage pour plein de kérosène

Xenogears se joue à la manière d’un RPG classique (villages, combats, expérience, armes, magies, vous connaissez la musique) et réutilise le désormais classique système Active Time Battle (chaque personnage doit attendre un certain temps, symbolisé par une jauge, avant de pouvoir réaliser une action), mais bénéficie d’un système de combat radicalement unique grâce à deux éléments tout à fait novateurs : les Deathblows et les Gears. Commençons par parler des Deathblows.

Lorsque vous vous battez et utilisez des attaques physiques, vous pouvez utiliser trois types d’attaques différents. Vous pouvez lancer une attaque faible mais précise avec le bouton Triangle, une attaque un peu plus puissante mais moins précise avec le bouton Carré, et une attaque puissante mais peu précise avec le bouton Croix. A chaque tour, vous disposez d’un nombre fixe de points d’attaque physique, qui évolue au fil du jeu : vous en avez trois au tout début, et terminez l’aventure avec sept. Une attaque lancée avec Triangle consomme un point, une attaque lancée avec Carré deux, une attaque lancée avec Croix trois. Vous comprenez qu’il est possible de réaliser des enchaînements d’attaque : trois attaques faibles ou une attaque moyenne et une attaque faible au début du jeu, par exemple. Certains enchaînements particuliers se nomment des Deathblows : lorsque vous les réalisez, une attaque spéciale très puissante est déclenchée. Mais ces Deathblows ne sont pas innés : vous commencez l’aventure avec certains enchaînements et devez apprendre les autres au fil de votre aventure (sachez que plus vous avez de points d’attaque physique, plus vous pouvez apprendre de Deathblows). Lorsque vous utilisez un Deathblow déjà maîtrisé, la jauge d’expérience de certains des Deathblows suivants se remplit. Une fois la jauge pleine, vous acquérez un nouveau Deathblow. Chaque personnage possède un nombre conséquent de Deathblows, permettant ainsi de pimenter les combats. Pour ne rien gâcher, ces attaques spéciales sont l’occasion d’assister à de sympathiques effets visuels.

Il est également possible, pour les plus acharnés d’entre vous, de réaliser des combos de Deathblows. Je vous ai expliqué que chaque attaque physique consomme des points d’attaque physique et que vous en avez un nombre fixe à chaque tour. Mais sachez que vous n’êtes pas obligé d’utiliser tous vos points à chaque tour ; vous pouvez conserver des points d’attaque et les accumuler au fil des tours ! Une fois suffisamment de points accumulés, vous pouvez déclencher plusieurs Deathblows à la fois pour un résultat dévastateur…

Le deuxième élément qui rend les combats véritablement uniques dans le jeu, ce sont les Gears. Ces robots géants qu’on jurerait tout droit sortis d’un épisode de Gundam sont un élément-clé du titre, et beaucoup de combats se déroulent aux commandes de ces Gears. Les combats en Gear partagent plusieurs points communs avec les combats normaux mais sont tout de même assez différents ; tout d’abord, chacune de vos actions (à l’exception des magies) est régie par vos points de fioul. Une attaque lancée avec Triangle consomme 10 points de fioul, une attaque lancée avec Carré en consomme 20, une attaque lancée avec Croix en consomme 30. Il est possible de recharger votre fioul au rythme de 30 points par tour ; de plus, vous pouvez activer ou désactiver à l’envi une option nommée « Booster » qui augmente la puissance et la vitesse de vos Gears au prix d’une plus grande consommation de fioul. Les Deathblows sont également utilisables lorsque vous combattez avec vos Gears ; leur nombre dépend des Deathblows que vous avez déjà à votre disposition en combat normal. Les combats en Gear sont souvent plus difficiles que les combats normaux, car se régénérer consomme énormément de fioul. Le joueur est donc souvent amené à jouer dangereusement, flirtant avec le Game Over pour conserver suffisamment de fioul et abattre l’ennemi. Pour améliorer les performances de vos Gears, vous pourrez vous rendre dans des échoppes spécialisées qui permettront d’améliorer leur nombre de points de vie, leur défense, ou leur réserve de fioul. Il est de plus possible d’équiper sur votre Gear des accessoires pour lui empêcher de perdre en précision ou pour lui assurer une meilleure vitesse, par exemple.

Cette idée de « flirter avec le Game Over » semble être une volonté des développeurs ; en témoigne la présence du mode Infini. Chaque fois que vous utilisez une attaque normale avec votre Gear, son niveau d’attaque augmente. Ce niveau démarre à 0 et peut atteindre 3 si vous n’utilisez pas de Deathblows entretemps (il retombe à 0 dès que vous utilisez un Deathblow). Une fois au niveau 3, et si votre Gear a reçu suffisamment de dommages, il peut entrer en mode Infini pendant trois tours. Votre Gear est alors beaucoup plus rapide, puissant et résistant, et peut déclencher des Deathblows particuliers dont la force de frappe est colossale. Ce mode Infini est donc à double tranchant : il peut renverser un combat qui semblait perdu mais peut vous mener à votre perte si vous jouez de façon trop téméraire.

Le titre est par ailleurs ponctué de plusieurs mini-jeux intéressants, tels qu’une arène de combat où les Gears s’affrontent comme dans un véritable jeu de combat ou encore un jeu de cartes aux tactiques assez subtiles. Le gameplay de Xenogears est cependant loin d’être parfait : tout d’abord, si la caméra peut tourner à 360 degrés (une initiative appréciable) certains angles de caméra sont particulièrement handicapants lors des quelques phases de plates-formes du jeu. La Tour de Babel en particulier, avec ses sauts qui doivent être calibrés au millimètre près, a rendu fou plus d’un joueur. De plus, la navigation dans les menus est parfois bien peu ergonomique et peut lasser le joueur après un certain temps. Ajoutez à cela une fréquence de combats aléatoire tellement élevée que certains donjons peuvent rapidement virer au cauchemar, et vous obtenez un jeu certes novateur sur bon nombre de plans mais à la jouabilité clairement perfectible.

Le périple de Fei commence dans le village de Lahan.

Et le budget s’envola vers des projets plus prometteurs…

Xenogears est un long jeu de rôle. La trame principale vous tiendra en haleine une solide cinquantaine d’heures ; malheureusement, seules deux petites quêtes annexes viendront prolonger votre partie (à noter qu’une d’entre elles apporte un complément scénaristique non négligeable). Pourquoi un nombre si réduit de quêtes annexes ? Pour comprendre cela, il faut revenir à l’époque de la fabrication du jeu. Après le développement du premier CD, le budget alloué à Xenogears avait déjà été entièrement consommé ; une petite partie du budget aurait même été transférée vers le développement de Final Fantasy VIII, dans lequel Square plaçait bien plus d’espoirs. Ces coupes budgétaires ont eu plusieurs conséquences : au-delà du nombre famélique de quêtes annexes, le deuxième CD a pris une direction complètement inattendue, déclenchant de virulentes réactions chez de nombreux joueurs.

En raison du manque de temps et d’argent pour développer le titre, le deuxième CD s’est vu amputé de presque toutes ses phases de jeu. Après un premier disque s’étalant sur presque quarante heures et offrant plusieurs phases de jeu variées, le second disque dure à peine dix heures et est en réalité principalement composé de cinématiques et de textes. Le joueur ne visitera durant cette partie que trois donjons, affrontera quelques boss et passera le reste du temps à faire défiler des textes et à contempler des cinématiques. Ce second CD a été extrêmement critiqué par beaucoup ; difficile de ne pas ronger son frein quand on voit l’un des personnages décrire un donjon que le joueur aurait normalement dû explorer… Le seul véritable avantage de ce choix, c’est qu’il permet une montée en puissance fulgurante du scénario, qui n’acquiert toute son ampleur que dans ces dix dernières heures. Mais cela, nous y reviendrons.

La difficulté du jeu est assez basse ; hormis certains donjons (notamment la Tour de Babel) et quelques combats de boss (en Gear, la plupart du temps), vous ne devriez pas éprouver trop de difficultés à finir l’aventure et le level-up n’est quasiment d’aucune utilité. On notera toutefois que la difficulté augmente assez brusquement dans le second disque.

Tout un programme !

Solo de guitare pour finir en beauté !

C’est Yasunori Mitsuda, l’un des compositeurs emblématiques de Squaresoft, qui s’est attelé à la bande-son de Xenogears. Le résultat proposé n’est certainement pas son meilleur travail (un certain nombre de thèmes trop génériques pour véritablement marquer le joueur est présent) mais il convient de saluer le soin tout particulier apporté à plusieurs morceaux. Ship of Regret and Sleep, le thème de l’église, est absolument prodigieux et marie à merveille instruments à cordes et sons cristallins. Awakening, thème du combat final, utilise superbement les chœurs pour un résultat rafraîchissant qui change des morceaux grandiloquents que l’on retrouve d’ordinaire dans les combats finaux des RPG signés Squaresoft. Quant à Singing of the Gentle Wind, thème du village de Nisan, il est très reposant et vous serez probablement tenté de poser un instant votre manette en l’entendant. Impossible également de ne pas évoquer Small Two of Pieces, le thème du générique de fin, qui fut le premier morceau chanté dans l’histoire de la firme et qui se révèle absolument délicieux.

Les cinématiques réalisées dans un style anime bénéficient également d’un doublage. Le doublage japonais est excellent et rend très bien compte des émotions, ce qui est logique quand on considère la grande tradition du doublage dans ce pays. Quant au doublage anglais, en plus d’être plutôt caricatural, il souffre de graves problèmes de synchronisation. Préférez-lui sans hésitation le doublage original.

Xenogears peut être dérangeant par moments.

I am Alpha and Omega, the beginning and the end, the first and the last.

C’est sur ce verset biblique (Révélation 22:13, pour être précis) que s’ouvre Xenogears. La cinématique d’introduction montre un immense vaisseau spatial naviguant dans le cosmos ; c’est alors qu’une force inconnue s’en empare et en prend les commandes. L’équipage tente d’arrêter ce fléau mais rien n’y fait ; l’astronef est désormais contrôlé par une mystérieuse entité. Sur tous les écrans de contrôle apparaît alors le message suivant : « You shall be as Gods » (Vous serez comme des dieux). Le capitaine tente de faire évacuer les passagers mais ceux-ci sont tous tués par les armes de défense du vaisseau alors qu’ils tentent de s’échapper. En désespoir de cause, le capitaine lance l’autodestruction du vaisseau, qui s’écrase sur une planète voisine. Une femme émerge des débris du véhicule spatial : elle est entièrement nue et possède une longue chevelure mauve…

Cette cinématique, dont la véritable signification ne sera révélée que très tard dans le jeu, sert de prélude au scénario de Xenogears. Si le fait que le jeu s’ouvre sur un passage biblique n’est pas suffisamment explicite, soyez-en sûr : le script du titre s’appuie énormément sur la religion chrétienne et sur ses diverses traditions. Le jeu ne s’arrête pas à cette influence : on trouve également des éléments inspirés du gnosticisme, mais aussi certains concepts liés à la psychanalyse telle qu’elle a été définie par Sigmund Freud ou Carl Jung. Contrairement à beaucoup de titres qui introduisent ces éléments de façon tout à fait maladroite, dans le seul but de donner une signification faussement profonde à leur scénario, Xenogears se révèle étonnamment habile dans l’utilisation de ces nombreuses influences. Chaque élément est utilisé de façon subtile ; même lorsqu’il est extrapolé par rapport à sa signification initiale, il ne paraît pas dénaturé. Aucune simplification outrancière n’est opérée, quitte à dérouter le joueur par moments ; il est évident que Takahashi a effectué des recherches poussées pour introduire les éléments les plus exacts possibles.

Sachant que Xenogears utilise de nombreux éléments reliés à la psychanalyse, il serait logique de s’attendre à ce que ses personnages aient une psychologie extrêmement bien construite. C’est effectivement le cas ; chaque personnage important est doté d’une personnalité solide qui tranche avec beaucoup de clichés coutumiers des RPG japonais. Si le héros, Fei, semble tout d’abord être l’élu qui a du mal à prendre conscience de son pouvoir que l’on retrouve dans beaucoup de jeux du genre, son personnage évolue progressivement pour atteindre une profondeur et une complexité absolument déconcertantes par la suite. L’héroïne principale, Elly, est loin du personnage féminin fragile et niais que l’on peut souvent trouver dans les jeux de rôle nippons ; elle est souvent déchirée entre plusieurs influences et apparaît souvent désorientée face à des évènements qui la dépassent. Les représentations de ses sentiments sont bien souvent criantes de réalisme et sauront captiver le joueur en quête de protagonistes marquants. Par ailleurs, le manichéisme n’existe quasiment pas dans Xenogears ; dans leur grande majorité, les personnages ne sont ni de preux chevaliers ni de vils démons, mais sont très humains et donc bien plus marquants pour le joueur.

Dans l’introduction, j’évoquais une polémique brûlante liée à Xenogears. Celle-ci est liée à la description de la religion (et en particulier du catholicisme) qui est faite dans le titre. Sans vous dévoiler l’intrigue, sachez que le jeu remet en question les pratiques des institutions religieuses, le comportement des ecclésiastiques vis-à-vis des fidèles, les liens entre religion et politique, ou encore la foi aveugle. Ces critiques sont parfois très dures mais restent subtiles et ne sont jamais indigestes. Le joueur n’a donc jamais l’impression que Xenogears est un brûlot écrit par quelqu’un de profondément opposé à la religion ; au contraire, le titre nous invite à réfléchir par nous-mêmes et à nous interroger sur ce domaine. Il convient de saluer cette initiative, qui aurait pu tourner au désastre, mais qui se révèle très bien exécutée et qui confère donc beaucoup plus de poids au script de Xenogears.

Le titre est de plus très intéressant car il tranche radicalement avec la politique de Squaresoft, qui a toujours privilégié le traitement de thèmes plutôt légers. Au-delà d’une intrigue principale très touffue (j’y reviendrai par la suite), Xenogears n’hésite pas à aborder en filigrane des thèmes graves tels que la prostitution, le cannibalisme, le racisme, ou encore l’eugénisme. Il convient toutefois de souligner que le jeu ne s’appesantit jamais sur ces thématiques mais les évoque à demi-mot, laissant le joueur opérer sa propre réflexion en lui montrant les conséquences que peuvent avoir certains de ces actes. Très lourds de sens, les messages de Xenogears ne sont cependant jamais indigestes car toujours évoqués avec finesse.

Peut-on donc reprocher quelque chose au scénario de Xenogears ? Hélas, oui. Le jeu est très long et l’histoire est extrêmement dense ; de plus, celle-ci est souvent racontée par bribes. Il n’est pas rare qu’un élément capital pour la compréhension du scénario global soit évoqué au début du jeu et ne soit plus jamais mentionné durant toute l’aventure. De plus, en raison des problèmes de budget et de temps déjà évoqués, certains points indispensables à la compréhension du script n’ont pu être incorporés. L’intrigue est extrêmement complexe (mais diablement passionnante), les personnages sont psychologiquement très fouillés et l’univers mis en place par Xenogears est étonnamment riche quand on pense qu’il s’agit d’un seul jeu et non pas d’une série entière. Par conséquent, une fois arrivé à la fin du jeu, il est fort probable que vous n’ayez compris que la moitié du scénario. Soyons clairs ; il est tout bonnement impossible d’avoir entièrement compris le scénario du titre après y avoir joué une fois. Celui-ci est si complexe qu’un livre a été édité au Japon ; baptisé « Xenogears Perfect Works », il regroupe des artworks inédits mais surtout un résumé complet de la mythologie Xenogears étalée sur près d’une centaine de pages. La lecture de ce recueil (dont la traduction est disponible sur Internet) ainsi que de résumés de l’intrigue générale seront certainement indispensables à une bonne compréhension de l’ensemble du script une fois le jeu achevé.

Par ailleurs, l’évolution du scénario est assez poussive pendant la majeure partie du jeu ; pendant presque l’ensemble du premier CD, le script évolue de façon assez lente et le joueur n’a pas l’impression qu’une intrigue globale se met en place. Il faut attendre la toute fin du premier CD (et une suite de révélations explosives) pour entrer dans le deuxième CD, qui marque l’apothéose du scénario de Xenogears. Pendant les dix petites heures que dure ce second disque, le joueur va voler de révélation en retournement de situation sans même avoir le temps de souffler et de comprendre l’immensité de l’univers scénaristique du jeu. Xenogears est donc un titre paradoxal ; s’il possède probablement l’un des scénarii les plus profonds et les mieux écrits jamais intégrés dans un jeu vidéo, son script se distingue également comme l’un des plus inaccessibles et des plus complexes à interpréter.

Le second CD, resté dans les mémoires pour son texte interminable…

C’est l’heure de rendre les copies !

Graphismes : Malgré une plastique qui a beaucoup vieilli (le jeu étant entièrement en 3D, il apparaît aujourd’hui très pixellisé), on saluera tout de même les quelques cinématiques présentes dans le jeu. Réalisées par les dessinateurs de l’anime Ghost in the Shell, elles sont véritablement superbes et sont toujours un plaisir à regarder.

Jouabilité : Xenogears fait le pari d’un gameplay complexe et novateur, en introduisant les systèmes de Deathblows et de combats à bord des Gears. Si le résultat se révèle dans l’ensemble très agréable à jouer et change de beaucoup de RPG à la jouabilité outrageusement simplifiée, on regrettera une caméra par moments capricieuse, certaines phases de plates-formes à se taper la tête contre les murs, des donjons parfois peu inspirés, un nombre trop élevé de combats aléatoires et une navigation dans les menus relativement peu ergonomiques. Dommage donc que le titre soit desservi par ces multiples errances dans le gameplay.

Durée de vie : L’aventure proposée par Xenogears est longue et s’étale sur une solide cinquantaine d’heures ; dommage en revanche que les multiples coupes budgétaires aient forcé les développeurs à retirer beaucoup de quêtes annexes, qui demeurent présentes en nombre très réduit. Par ailleurs, le caractère très contemplatif du second disque risque de dérouter certains joueurs, voire d’en agacer. La difficulté est quant à elle plutôt basse et peu de boss devraient vous poser des difficultés.

Bande-son : Mitsuda signe dans ce titre un travail, sinon extraordinaire, plutôt bon. Plusieurs morceaux se révèlent marquants (Small Two of Pieces, Ship of Regret and Sleep entre autres) mais beaucoup de pistes sont trop génériques et font que la bande-son de Xenogears, dans son ensemble, laisse finalement une impression en demi-teinte. Le doublage est quant à lui de haute volée, du moins dans sa version originale…

Scénario : Xenogears développe l’un des univers les plus titanesques et les plus cohérents jamais proposés dans un jeu vidéo. Utilisant avec un talent rare de multiples influences allant de la Bible à Freud en passant par la tradition gnostique, le titre s’attache également à développer à l’extrême la psychologie de ses personnages, qui comptent parmi les plus poignants jamais dépeints dans ce média. N’oublions pas le traitement exemplaire qui est fait de thèmes sérieux tels que la prostitution ou le racisme, et encore plus de la religion, dont Xenogears offre une vision d’une grande lucidité. L’histoire est quant à elle passionnante et extrêmement bien écrite (même si son développement est tardif). Hélas, les explications sont souvent confuses tant elles sont complexes, et le joueur se retrouve souvent perdu face à cette colossale mythologie, l’obligeant à effectuer des recherches. Seule ombre au tableau pour un script absolument magistral qui n’a quasiment aucun équivalent dans le jeu vidéo.

Conclusion : Depuis sa naissance, Xenogears n’a de cesse de déchaîner les passions. Œuvre géniale et avant-gardiste minée par ses problèmes de budget pour ses admirateurs, fresque grotesque et incompréhensible percluse de défauts de gameplay selon ses détracteurs ; le titre fait débat et il est encore aujourd’hui bien difficile de rendre un jugement définitif sur le travail de Tetsuya Takahashi. La jouabilité est défaillante, c’est vrai. Le second CD peut être vécu comme une frustration par certains, c’est indéniable. Le scénario est d’une complexité effrayante, c’est un fait. Mais au joueur qui arrive à dépasser cela, s’ouvre alors un univers absolument indescriptible, dont l’ambition avouée est de nous faire réfléchir sur notre propre monde et qui se révèle incroyablement marquant. La forme est imparfaite, le fond est magistral. Voilà qui illustre bien toute l’ambivalence de Xenogears, ce jeu qui marqua le paysage vidéoludique de son empreinte à nulle autre pareille.

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